Y a pas à dire...

... ou mieux dit par d'autres

Michel Houellebecq

Une petite centaine de pages vite balancées pour revenir d’abord sur la polémique après son entretien avec Michel Onfray dans la revue Front populaire, où l’évocation d’une menace musulmane associée à la délinquance inspire un réel malaise. Le sacré de l’écrivain en France donne à Michel Houelbecq toute liberté de provoquer, même quand plus tard, et notamment dans ces feuilles-ci lâchées en une quinzaine de jours, il se reprend, un peu malhabilement, en soutenant une confusion dans la manière d’exprimer sa pensée. Un prétendu désordre dans sa réflexion auquel le recteur de la Grande Mosquée de Paris ne semble pas avoir été sensible en déposant sa plainte contre l’auteur. Et puis, il y a l’autre étrange épisode qui l’emmène à Amsterdam pour une baise filmée à trois, mais où il comprend après coup la vraie teneur du contrat signé avec un producteur néerlandais de films porno qui le traîne depuis devant les tribunaux de son pays. C’est évidemment le plus attendu, et le plus croustillant, de ce petit ouvrage de récriminations racoleuses et de jérémiades à tout va. Heureusement, la plume demeure pour rappeler l’écrivain. 

« L’homme ne s’en cache pas : il aime le sexe, le triolisme, le porno amateur, l’alcool, les anxiolytiques : un cocktail détonant qui le pousse à multiplier les « conneries », jusqu’à signer un contrat inique avec le Cafard un soir de décembre 2022. Au lecteur de juger de la force de son plaidoyer. » 1

« Pas plus qu’il n’aime la démocratie représentative, il n’accorde à l’art du roman son pouvoir de représenter la vie. Si le roman moderne, né des Lumières et de la révolution industrielle, « absorbe les contradictions » de la démocratie, pour citer la formule de l’essayiste Nelly Wolf, alors Houellebecq, aussi profondément anti-Lumières qu’anti-républicain, cherche à détruire le genre en même temps que la société. » 2

« Son petit livre post-trauma aurait pu donner lieu à un roman autour du « Mal » contemporain qui se propage sur les réseaux sociaux, où l’image et l’algorithme submergent tout. Il n’en brosse ici qu’une esquisse. Sauf sur les questions politiques, il n’appartient pas au lecteur de porter un jugement sur l’éventuelle dérive privée d’un auteur. Juste à espérer qu’il demeure un écrivain. » 3

« Michel Houellebecq est un pur produit des années 1990. Comme Philippe Starck, Jeff Koons ou Karl Lagerfeld, il a fait de son nom… une marque. Tous se sont épanouis dans une période qui a vu un monde traditionnel et local disparaître au profit de la mondialisation, du marketing de masse, de la rentabilité à court terme. Leur caractère commun ? Ils sont bavards. Des bavards majuscules, enveloppant leurs produits d’une capacité de baratin hypnotique. Intarissables exhibitionnistes, excellant dans l’art de palabrer sur leur métier et sur n’importe quoi, ils offrent une narration, suscitent adhésion, « sympathie » ou répulsion, affabulent, créent du contenu. » 4

Quelques mois dans ma vie. Octobre 2022-mars 2023 de Michel Houellebecq, Éditions Flammarion

1 Marianne Payot, L’Express, 1 juin 2023

2 Marc Weitzmann, L’Express, 8 juin 2023

3 Gilles Heuré, Télérama, 31 mai 2023

4 Marie-Dominique Lelièvre, Le Journal Du Dimanche Magazine, 28 mai 2023

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest
WhatsApp
Email